Le projet d’incinérateur annoncé par le maire de Bergerac continue de faire des remous dans l’opposition et pousse l’élu écologiste Lionel Frel à démissionner de sa fonction de vice-président de la commission extra-municipale de la transition écologique, “lassé de servir de caution écolo“, dit-il.
Retour sur ce débat.
Le 17 novembre dernier, à l’occasion du conseil municipal, les élus ont vu arriver en fin de séance une motion visant à valider le principe d’installation d’un incinérateur à déchets sur le territoire de Bergerac. Une proposition que le maire de la ville dit avoir dans les tuyaux depuis un moment, même si l’on n’en trouve aucune trace dans ses documents de campagne, et qui est mise en avant comme une solution aux tarifs polémiques annoncés par le SMD3 pour la future redevance incitative. Jonathan Prioleaud qui estime alors présenter là une solution écologique et économique. Extraits du conseil municipal :
” Est-ce qu’on peut continuer, pour nous-mêmes et pour les générations à venir, à enfouir les déchets ? […] On a une évolution technologique de la part des incinérateurs et des rejets dans l’air qui sont quasiment à 0 aujourd’hui. Et en plus, on peut se servir de l’incinérateur à déchet pour réaliser de l’énergie. Et donc on aimerait le faire sur Bergerac pour combiner l’incinération à la production d’un réseau de chaleur.” Jonathan Prioleaud, maire de Bergerac
L’incinérateur qui serait installé du côté de la poudrerie et qui permettrait de chauffer les sites d’Aragon, Picquecailloux, la CAB, voire l’hôpital, le commissariat, etc… Pour le maire de Bergerac, il permettrait également de créer de l’emploi et de faire gagner du pouvoir d’achat aux Bergeracois. Jonathan Prioleaud qui entend passer par une délégation de service public et qui estime que dans la mesure où il devra y avoir un incinérateur sur le Département, autant qu’il soit à Bergerac.
Des arguments à priori recevables, mais que l’opposition a toutefois démonté point par point. Du côté du groupe Bergerac en commun, écologistes et communistes soulignent qu’il s’agit d’une compétence de la Région et non municipale et parlent d’aberration démocratique, économique, sociale et surtout écologique.
“Aberration écologique parce qu’à l’heure actuelle, la politique nationale va vers une réduction des déchets. Ce sont des engagements nationaux, internationaux, régionaux aussi à travers le plan de prévention et de gestion des déchets du Conseil Régional dans lequel les collectivités doivent s’inscrire. Ce plan prévoit d’ailleurs qu’il n’y a aucun besoin d’incinérateur nouveau en Nouvelle Aquitaine puisque les capacités de traitement des ordures ménagères sont suffisantes”. Lionel Frel, élu d’opposition EELV
On peut ajouter qu’en 2017, la commission européenne préconisait l’instauration de taxes d’incinérations, une suppression des aides en faveur de l’incinération et surtout l’introduction d’un moratoire sur la construction de nouvelles installations. “D’autant que ces incinérateurs, il faut continuellement les alimenter“, souligne Lionel Frel, qui estime qu’il faudra nécessairement produire plus de déchets ou aller en chercher ailleurs pour le faire fonctionner quelque soit son dimensionnement. “Ce sera un aspirateur à poubelles” avait ainsi illustré Fabien Ruet lors du conseil. Un concept qui va donc à l’encontre de l’incitation à réduire ses déchets.
Autre point soulevé par l’opposition : la question sanitaire. Comme Hélène Lehmann, de Bergerac avec confiance, l’élue communiste Julie Tejerizo dénonce le mythe du zero émission de produits toxiques.
“On le voit aujourd’hui, sur toutes les installations de ce type, il y a des rejets d’ammoniaque, de dioxydes de carbone, de cyanure et bien d’autres encore. Des maladies en lien avec ces rejets, qui se retrouvent devant les tribunaux et c’est un scandale sanitaire qui est avéré aujourd’hui.” Julie Tejerizo, élue d’opposition PCF
Scandale sanitaire et environnemental donc pour l’opposition de gauche qui continue d’énumérer les problématiques liées à l’installation d’un tel équipement : dangerosité si implantation sur un site Seveso seuil haut, coût exorbitant d’un incinérateur et d’un réseau de chaleur, le tout sans concertation citoyenne et dans le cadre d’une potentielle délégation de service public dont on ne connaît que trop les dommages grâce à la SAGS et le parking souterrain, souligne Lionel Frel. Les élus de Bergerac en commun qui comptent bien appeler les Bergeracois à se mobiliser si d’aventure le dossier allait plus loin.
Jonathan Prioleaud lui, va demander une étude à l’Ademe sur la faisabilité du projet. Et assure que si cela ne se révèle pas indispensable, il n’y aura pas d’incinérateur à Bergerac.
Dossier à suivre donc. Il sera peut-être remis sur le tapis d’ailleurs à l’occasion de la réunion publique organisée lundi à 19h, à la salle Anatole France au sujet de la future redevance incitative. Réunion qui devrait se tenir en présence de représentant(s) du SMD3.